Odonata - Libellules
- Caloptérix vierge - photo Gilles Bentz LPO
- Agrion porte-coupe - photo Nicolas Macaire LPO
- Sympetrum fonscolombi - photo Christian Aussaguel
Insectes prédateurs avec de grands yeux, de petites antennes en forme de poils et un corps relativement long. Les ailes rigides bruissent souvent en vol. Elles possèdent un dense réseau de nervures longitudinales et transverses, et elles ont le plus souvent une tache à l'extrémité des ailes : le ptérostigma. Le vol est souvent très rapide et étonnamment agile. Les ailes antérieures et postérieures ne sont pas couplées et peuvent battre indépendamment ce qui fait que les libellules peuvent voltiger dans toutes les directions, même en arrière, ce qui avec leur vue très étendue les rend souvent très difficile à attraper. L'appareil reproducteur mâle des Odonates est l'une des particularités les plus étonnantes dans le règne animal puisqu'il est situé très en avant sur l'abdomen - face ventrale des deuxième et troisième segments abdominaux -, qu'ils ne possède aucune liaison anatomique interne avec les testicules et que le pore génital se trouve entre les huitième et neuvième segments. Les libellules se nourrissent d'autres insectes, qu'elle attrapent au vol et maintiennent entre leurs pattes épineuses, formant une sorte de corbeille. Certaines petites espèces chassent dans la végétation en faisant s'envoler leurs proies.
Il y a environ 6000 espècesconnues, principalement sous les Tropiques. En Europe vivent plus d'une centaine d'espèces divisées en deux sous-ordres : les Zygoptères et les Anisoptères.
Sommaire
Historique
Les libellules appartiennent à un groupe d’insectes très anciens. Des fossiles préhistoriques datés de 300 millions d’années ont été retrouvés notamment à Commentry, dans l’Allier. Cet ancêtre portait le nom de Meganeura monyi et vivait au Carbonifère : cette libellule était de taille gigantesque puisque son envergure atteignait 70 cm ! De nos jours, avec 10 cm d’envergure, l’Anax empereur est l’une des plus grandes libellules de France.
Zygoptères - Anisoptères
- Les Zygoptères regroupent les Demoiselles, insectes délicats au corps fin et au vol souvent faible. La tête est très transverse et les yeux, bien séparés, sont rejetés de chaque côté. Les ailes antérieures et postérieures sont à peu près semblables (Zygoptères= ailes égales) et, chez la plupart des espèces, sont maintenues verticalement au-dessus du corps au repos.
- Les Anisoptères sont des insectes plus grands, plus massifs et que l'on nomme souvent Libellules pour les distinguer des demoiselles. Les ailes postérieurs sont plus larges que les antérieures (Anisoptères=ailes inégales) et, au repos, elles sont maintenues étalées de chaque côté du corps. La tête est généralement plus globuleuse et les yeux, souvent très grands, se rejoignent fréquemment sur le dessus de la tête. Les imagos chassent au vol de deux façons différentes; soit à l'affût à partir d'un perchoir : la libellule attendant qu'une proie passe à sa portée pour se précipiter dessus, elle rejoint ensuite son perchoir pour la dévorer ; soit à la poursuite, comme les Aeshnes qui ne se posent presque jamais. Les espèces européennes sont essentiellement héliophiles, bien que certaines puissent voler au crépuscule surtout si les proies sont abondantes.
- L'agrion élégant appartient aux Zygoptères - photo Nicolas Macaire LPO
- Le sympetrum rouge-sang appartient aux Anisoptères - photo Nicolas Macaire LPO
Comportement et biologie
Les Odonates s'accouplent d'une façon très particulière, ce qui est lié à l'emplacement du "pénis" chez le mâle. L'extrémité abdominale du mâle porte une paire de cerques modifiés et nommés forceps ou pince anale de forme différente pour chaque espèce. Ils sont généralement courbes, souvent longs et particulièrement visibles chez les Anisoptères chez lesquels existe aussi un appendice inférieur impair : la lame supra-anale. En plus de la pince anale, les Zygoptères ont une paire d'appendices inférieurs plus petit. Les femelles d'Anisoptères peuvent également posséder des cerques bien développés mais ils sont généralement plus fins et plus droits que ceux des mâles. Certaines femelles possèdent un ovipositeur.
Lorsqu'une femelle traverse le territoire d'un mâle, celui-ci se précipite vers elle, la courtise et la saisit avec sa pince anale soit par le cou (Zygoptères) soit par la tête (Anisoptères), la figure que forme alors le couple attaché l'un derrière l'autre s'appelle le tandem ; mâle et femelle peuvent voler dans cette position jusqu'à ce que le mâle ait trouvé un endroit pour s'accoupler. Le mâle met en contact son appareil copulateur avec l'orifice génital afin de transférer le sperme; puis la femelle recourbe son abdomen et l'accouplement a lieu. La nouvelle figure ainsi formée par le couple s'appelle la roue.
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Accouplement d'agrions - Turquie - photo Nicolas Macaire LPO
L'accouplement terminé, les partenaires peuvent ou non se séparer, mais beaucoup d'espèces, particulièrement parmi les Zygoptères et certains Anisoptères, restent en position de tandem jusqu'à ce que la femelle ait fini de pondre. Les oeufs peuvent être soit abandonnés dans l'eau, soit insérés dans les tissus végétaux avec l'ovipositeur. Certaines femelles peuvent même descendre sous l'eau pour déposer leurs oeufs dans les tiges des plantes aquatiques.
Les larves
Les larves croissent dans l'eau et se nourrissent d'autres animaux aquatiques qu'elle capturent grâce à un organe préhensile très particulier : le masque, qui est en fait la lèvre inférieure (ou labium) très modifiée. La plupart des espèces bouclent leur cycle en un an, mais chez certains Anisoptères celui-ci peut s'étaler sur plusieurs années, voire 4 ou 5 ans spécialement dans les régions froides de l'Europe du Nord. Quelques espèces ont par contre deux générations par an dans le Sud. Quand la larve a terminé sa croissance, elle sort de l'eau en montant sur une plante ou tout autre support pour effectuer sa mue imaginale. En été, on trouve fréquemment des exuvies sur la végétation au bord des mares et des cours d'eau.
Les imagos fraîchement éclos sont très pâles et obtiendront leurs couleurs définitives quelques jours à quelques semaines plus tard. De nombreuses espèces et spécialement les mâles développent une pruinosité plus ou moins bleue qui recouvrira de nombreuses parties du corps de l'individu sexuellement mature. Beaucoup perdent leurs couleurs après la mort, la coloration est alors un mauvais critère pour les identifier.
La classification des Odonates est largement fondée sur la nervation alaire.
Libellules appartenant à la Directive Habitat
Certaines espèces de libellules font partie de la Directive Habitat 92/43/CEE. La Directive Habitat s’applique aux pays de l’Union Européenne depuis le 5 juin 1994. Elle a pour objet d’assurer le maintien de la diversité biologique par la conservation des habitats naturels, ainsi que de la faune et de la flore sauvages. La Directive Habitats prévoit la mise sur pied d’un réseau de zones protégées baptisée réseau « Natura 2000 ».
ESPECES | Annexe II (1) | Annexe IV (2) |
Agrion de Frey (Coenagrion hylas) | X | |
Agrion de Mercure (Coenagrion mercuriale) | X | |
Aeschne verte (Aeshna viridis) | X | |
Cordulégastre de Sicile (Cordulegaster trinacriae) | X | X |
Gomphe de Graslin (Gomphus graslinii) | X | X |
Leucorrhine à gros thorax (Leucorrhinia pectoralis) | X | X |
Leucorrhine à large queue (Leucorrhinia caudalis) | X | |
Leucorrhine à front blanc (Leucorrhinia albifrons) | X | |
Lindénie à quatre feuilles (Lindenia tetraphylla) | X | X |
Cordulie splendide (Macromia splendens) | X | X |
Gomphe serpentin (Ophiogomphus cecilia) | X | X |
Cordulie à corps fin (Oxygastra curtisii) | X | X |
Gomphe à pattes jaunes (Stylurus flavipes) | X | |
Leste enfant (Sympecma braueri) | X |
(1) Annexe II : liste d'espèces animales et végétales dont la conservation nécessite la désignation de Zones Spéciales de Conservation.
(2) Annexe IV : liste des espèces strictement protégées.
Où voir des libellules ?
Un site favorable pour les libellules doit rassembler les caractéristiques suivantes : c’est
- Une zone humide, de préférence eau douce : mares, rivières, canaux, tourbières acides, etc.
- Une eau « libre » sans lentilles d’eau ou d’algues envahissantes en surface ;
- Une végétation aquatique abondante : nombreuses plantes aquatiques qui poussent sur les berges ;
- Pas de pollution ;
- Une prairie naturelle à proximité est un plus et peut permettre aux adultes de chasser.
Libellules migratrices
Saviez-vous que certaines libellules entreprennent des vols migratoires comme les oiseaux ? Cela peut paraître étonnant et pourtant certaines espèces effectuent un vol de plusieurs heures dans une même direction les menant dans des localités imprévues. C’est le cas de l’Anax porte-selle Hemianax ephippiger vulgairement surnommé « globe-trotter » : cette libellule qui vit en zone équatoriale et tropicale d’Afrique a été exceptionnellement observée en France, en Angleterre et jusqu’en Islande. Des individus ont même été notés en montagne jusqu’à 4000 mètres d’altitude et à plus de 1000 mètres des côtes en mer !
Anax junius, espèce nord américaine, traverse exceptionnellement l’atlantique emporté par des vents d’ouest : 6 individus appartenant à cette dernière espèce ont été notés dans les Cornouailles (côte ouest Angleterre) au début septembre 1998, suite à une violente tempête atlantique.
Bibliographie
- Insectes de France et d'Europe occidentale - Michael Chinery - Edition Arthaud - 2002
- Libellules. Guide d’identification des libellules de France, d’Europe septentrionale et centrale., A. Wendler & J.H. Nüss, Edition SFO, Bois d’Arcy – 1994.
- Les libellules, la vie secrète des filles de l’air., G. Martin & E. Thévenon, Edition La Martinière, Paris – 1994.
- Guide des libellules d’Europe et d’Afrique du nord : l’identification et la biologie de toutes les espèces, J. d’Aguilar & J.L. Dommanget, Edition Delachaux & Niestlé – 1998.
- Guide Vigot de la vie dans les étangs, les ruisseaux et les mares, W. Engelhardt & Al., Edition Vigot – 1998.
- A guide to the Dragonflies of Great Britain, D. Powell, Edition Arlequin Press – 1999.
- Dragonflies on RSPB nature reserves, fiche d’information RSPB - 2000.
- Invertébrés d’eau douce : systématique, biologie, écologie, H. Tachet & Al., Edition. CNRS – 2000.
- Field guide to the Dragonflies and Damselflies of Great Britain and Ireland, S. Brooks & R. Lewington, Edition British Wildlife Publishing – 2002.
- A la rencontre des Libellules. Les cahiers techniques de la Gazette des Terriers. Fédération des clubs CPN – 2003.